Faut-il aller voir l'expo Bacon au Centre Pompidou ?
- Antoine Guitou
- 9 nov. 2019
- 2 min de lecture

Pompidou présente une nouvelle fois une exposition monographique sur un des artistes iconiques du 20ème siècle : Bacon en toutes lettres. Par le biais de ses influences livresques, à la fois littéraires et philosophiques, l'expo se veut innovant. Qu'en est-il vraiment ?
Une scénographie innovante
Cette exposition multi sensorielle, jouant de la vue comme de l’ouïe, a le mérite de présenter un format particulier. Sont à la fois présentés des triptyques monumentaux et des petits "studiolo" cubiques, dans lesquels sont exposés sous verre les ouvrages ayant appartenu au peintre. Des voix connues du théâtre et du cinéma en scandent à chaque fois un extrait. Et ces livres sacralisés, présentés comme des reliques répondent parfaitement aux triptyques, un format emprunté à la peinture religieuse. Les deux disent la dimension métaphysique de l’œuvre de Bacon (1909-1992), mêlant la chair la plus crue à la philosophie. Le face à face est instructif, tant sa peinture a quelque chose d’à la fois saisissant et profondément hermétique. Malgré les livres une part résiste à l’interprétation.
L'ombre de l'amant On sait au regard par sa biographie que beaucoup des ces corps et visages sont inspirés de son amant défunt, George Dyer. Il est représenté dans des situations évoluant entre la lutte et les ébats amoureux, avec le corps déliquescent dévoré par les ombres. Un jeu entre Eros et Thanatos qui puise autant dans la culpabilité de l’artiste que dans la tragédie grecque, qui inspirait Bacon. Les trois Furies du triptique de 1988 font ainsi écho aux Euménides d’Eschyle, texte présenté en début d’exposition.
L'absence du pape Le centre Pompidou a fait venir des œuvres de collections privées et réunit toutes les obsessions du peintre dans une sorte de face à face fantasmagorique. On y goûte l’immense plaisir aigre doux de ces œuvres qu’on ne reverra peut-être plus. Pourtant, on pourrait dire qu’on reste un peu sur sa faim, dans le sens où l’exposition nous est présentée comme une rétrospective et ne traite finalement que des 20 dernières années – les plus prolifiques – de la carrière de Bacon.
Point de papes par exemple, qui sont pourtant l'une des séries les plus connues et criantes de son génie. Enfin la peinture de Bacon requiert sans doute un recueillement religieux, qu’a essayé d’instaurer le musée avec sa scéno théâtrale, mais qui s’accorde mal avec les milliers de visiteurs. Voilà Bacon victime post mortem de son succès donc.
Antoine Guitou
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